Principale avenue menant au pavillon chinois (au dernier plan)
A Shanghai, le site de l'Exposition universelle n'est pas très accueillant - le personnel non plus, il effraye plutôt. Sur plus de cinq cent hectares au bord du fleuve Huangpu, les immenses avenues sont quasiment vides et les navettes circulent sans passager notable à bord, la foule se situant aux abords des 242 pavillons regroupés en fonction de leur région. Comme dans un jeu vidéo, on explore différents mondes. Mais gare au temps de chargement qui peut être long, très long... Plus de deux hures pour le pavillon français par exemple. Alors on se contente d'observer comme dans une vitrine la concrétisation de maquettes IRL. Là, des perles d'archi s'alignent (Angleterre, Suisse, Espagne, Portugal...), très souvent avec un soucis lié à la matière ou à la forme de la structure, comme c'est le cas pour le pavillon allemand que j'ai pu visité sans faire la file (raisons professionnelles, dieu merci).
Vue du pavillon français et suisse (qui comprend un téléphérique au dessus) depuis le pavillon allemand / Sortie de l'exposition
De gauche à droite : pavillon australien, espagnol, anglais, polonais portugais, turque.
La partie Depot du pavillon allemand exposait des matériaux composites et de célèbres réalisations allemandes de ses dernières années - dont la chaise Myto de Konstantin Grcic (ici en miniature) et la chaise Houdini de Stefan Diez. Attraction finale du pavillon, Energy Source mettait en scène un chinois et une allemande qui font bouger avec l'aide du public une grosse boule aux multiples écrans montrant les images d'une possible ville idéale.
L'Allemagne avait inventé le terme "Balancity" pour expliquer le pourquoi son pavillon (comprenez une contraction de "balance" et de "city"). La structure multi-facettes imaginée par Schmidhuber + Kaindl puise donc son inspiration dans deux mondes : celui de la ville, vertical avec ses immeubles, et celui de du monde rural, horizontal et vallonné. Le pavillon n'avait donc pas un toit mais plusieurs, tous verts, s'engouffrant chacun leur tour sur des surfaces plus urbaines : des éléments pluriformes en acier recouverts d'une nouvelle toile au nom imprononçable crée pour l'occasion. On arrive d'ailleurs de ce côté vert pour ensuite emprunter un tunnel qui nous amènent dans une sorte de labyrinthe à plusieurs salles thématiques autour de l'habitat, l'écologie, la musique, l'industrie etc... Sorte de carte postale impec' de l'Allemagne, mitraillée en numérique à tout va par les chinois. Car comme dans chaque pavillon, la logique est celle de l'accumulation. Accumulation d'informations nationales tous plus dithyrambiques les unes que les autres, accumulation d'étapes super ludique (du genre chaises musicales, toboggans...) qui excitent les chinois et boutiques marchandes où ces derniers se ruent en produits sponsorisés. Les chinois sont véritablement les seuls à profiter de cette exposition universelle, véritable parc d'attraction où l'on zappe de pays comme on change de manège.
Manger une choucroute industrielle à l'ombre du pavillon allemand a quelque chose d'exotique pour les visiteurs de l'exposition - soit 98% de chinois. Les queues ne leur font pas peur, le temps perdu non plus, l'argent encore moins. Au delà du mérite que l'exposition universelle à de pousser à ses retranchements le principe de l'architecture temporaire (et sur ce point celui de la Chine est une réussite) et de proposer une vision - bien que limitée - d'un pays, de ses innovations et de sa culture, le véritable échange de cultures (au delà de toute notion de coûts) apparaît inexistant, la course aux images préfabriquées menant le pas sur la pédagogie dans la découverte d'une nationalité étrangère. L'exposition universelle de Shanghai résume d'ailleurs assez bien l'ambiance qui règne depuis quelques année dans cette ville, qui attire en masse les investisseurs étrangers. Tirée à quatre épingle, hyper sécurisée, super propre, très culturelle, méga marchande et financière à crever. Soit la plus excitante des envolées capitalistes au pays des communistes.
La mascotte de l'Expo, Haibo - qui signifie "être universel" en chinois, est présente partout dans la ville. Ici dans la vieille ville.