25.6.09

EASY, AGAIN

Et l'on revient enfin à l'essentiel. À l'inverse d'un marché de l'art porté sur l'extravagance et la surenchère, le design industriel s'offre une cure de pragmatisme. Les nouveautés d'aujourd'hui sont les valeurs sûres de demain...


photo : Steve Wood (Stardust Fashion)

Plus d'un million de livres sterling pour un fauteuil de Marc Newson à la dernière vente Philipps de Pury à Londres. Le montant a de quoi faire sourire en temps de crise mais il démontre une fois de plus le fossé qui se creuse entre le design accessible à tous, d'Ikea à Vitra, et le design à très haute valeur ajoutée : celui des grandes galeries, du vintage haut de gamme au design art, de la pièce unique à la série limitée. Alors que les nouveaux riches se battent pour une pièce de Ron Arad ou de Zaha Hadid et déversent des millions pour se composer à chacun leur intérieur Prouvé/Perriand, Milan nous ramène à la fonction première du designer : créer de meubles fonctionnels et accessibles. Ainsi, à la dernière édition du Salone del Mobile, on a pu remarquer que s'opère chez quelques éditeurs une véritable prise de conscience. 



A coté des créations décalées et florales de Patricia Urquiola, des frères Campana ou de Karim Rashid, la tendance est celle d'un retour à la simplicité. "Super Normal" dixit Jasper Morrison. Ancré depuis la fin des années 80 dans cette optique, celui-ci ré-interprète pour Magis une simple chaise de trattoria en associant bois et plastique translucide (ci-dessus). Dans la même lignée, s'inspirant des objets du quotidien, l'anglais Sam Hecht (du studio Industrial Facility) propose pour Established & Sons une nouvelle définition du banc. À plusieurs dossiers, il se fait fauteuil ou tabouret. Le tout traité avec une extrême simplicité.



Chic et simple with a twist, la collection de SCP épate tout autant. Avec leur finitions raffinées, le fauteuil de Timorous Beasties (ci-dessus) et le bureau de Kay + Stemmer sont d'une rare évidence. Une fois n'est pas coutume, les frenchies ne sont pas en retard sur le sujet. Le bien nommé Moustache présente sa première collection où Inga Sempe s'amuse à reprendre les formes de votre affreuse armoire-trieuse et d'un simple chapeau de cuisine. Il en fait une ingénieuse Armoire souple et une lampe poétique.

Tout juste entrée dans la galaxie design, la marque Diesel, fière d'un double partenariat avec Foscarini (pour les luminaires) et Moroso (pour les meubles), lance sa ligne pour la maison. Pile dans la tendance, son style chic et négligé va faire fureur. Simplement composé de quatre oreillers blancs sur un piétement très 50's, le fauteuil Cumulus est le point fort de leur collection.

D'habitude silencieuse quand à ses collaborations avec de grands designers, lesquels signent anonymement pour la marque, Muji n'a pas attendu Milan pour annoncer sa collaboration avec Thonet. Je vous en avait d'ailleurs parlé l'année dernière, l'info avait été relayée dans la foulée par la presse, j'en avait fait ma pièce favorite pour 2009 et voilà que la série, à l'origine promise il y a deux mois, sort enfin cette semaine! nouvelle n°14 par James Irvine ou fauteuil en acier tubulaire inspiré de Breuer par Konstantin Grcic, le choix va être ardu...

20.6.09

4xHBC


Leesbury, New Jersey (1975)


Quatre préceptes d'Henri Cartier Bresson. A découvrir à l'oeuvre au Musée d'Art Moderne. Passage obligé.

/ La photographie doit sais dans le mouvement l'équilibre expressif
/ Il faut approcher le sujet à pas de loup, faire pate de velours, mais avoir l'oeil aigu
/ Eviter l'artifice qui tue la vérité humaine
/ Qu'il y a-t-il de plus fugace que l'expression du visage?

Brie, France (1968)

Words by Henri Cartier Bresson, to be seen at the Musée d'Art Moderne de Paris until september.

/ Photography must seize upon this moment and hold immobile the equilibrium of it
/ It is essential to approach the subject on tiptoe... with a velvet hand, a hawk's eye
/ The sitter must be made to forget about the camera and the man who is handling it
/ What is more fugitive and transitory than the expression on a human face?

Portrait de Truman Capote (1947)

Salerne, Italie (1933)

16.6.09

FIND ME THERE


Tables Tom Tom et Tam Tam, réedition d'un projet de Konstantin Grcic édité par SCP

Lecteurs de Menstyle.fr, bonjour !

Aujourd'hui et durant tout le mois de Juin, retrouvez-moi sur le portail internet de GQ, Vogue Hommes International, Condé Nast Traveller, AD et Wired. Suivez mes conseils design anti-crise en 10 étapes et découvrez mes intentions.

14.6.09

ONWARDS & UPWARDS



De retour de Bâle... la tête et le carnet plein à craquer puisqu'on vous interdit de prendre des photos à l'intérieur de la foire. Première étape : Design Miami. En marge d'Art Basel, la mini-foire hésite toujours un peu plus entre le design contemporain ou le mélange design art + vintage. Certains s'en plaignent, comme Loïc Bigot (Tools Galerie) qui regrette l'absence de certains designers contemporains. D'autres font les comptes. C'est le cas de la Carpenters Workshop et la Vivid Gallery où Brad Pitt a fait ses courses, privilégiant Atelier Van Lieshout : la Mini Capsule Hotel (ci-dessous) pour sa résidence de Santa Barbara, une chaise longue et une version féminine de la lampe Family. Pour un total avoisinant les 150 000 euros...

Trublion de génie, Rolf Sachs revisite la chaise de bistro en résine (Gabrielle Ammann) / Les sacs en cotton vendus étaient ornés d'une image provenant des archives Gio Ponti

Même si elle appartient désormais à Brandangelina, on pouvait toujours essayer cette fameuse maison dans le Never-Ever Land d'Atelier Van Lieshout à l'extérieur du Hall 5.

Que reste-t-il pour nous? Des choses abordables quoi que l'on en disent. Si vous ne comptez pas acheter du Royère chez Lacoste (vendu, tout de façon), votre porte monnaie ne fera pas la gueule pour des pièces d'Eric Benqué (Emmanuel Perrotin) ou des céramiques chez Pierre Marie Giraud. Grand public quoi que l'on en dise, Design Miami aime surprendre. Avec Real Time, étonnante métaphore humaine et physique sur la maîtrise du temps, de Milan à Bâle, Maarten Baas remporte haut la main l'installation la plus réussie du salon. Pour ceux qui y étaient, et qui hésitaient à frapper à la porte de l'atelier où était enfermé le monsieur : il ne réagit pas (ci-dessous).


Back from Basel... my head and note-book full to burst, as it was prohibited to take photos inside the exhibition. 1st stop : Design Miami. Situated next to Art Basel, the mini fair seems to be still "in between" two options : contemporary design and/or design art + vintage. Some complaints, as from Loïc Bigot (Tools Galerie) that he regrets the absence of certain contemporary designers. Others sum up the additions like the Carpenters Workshop Gallery and the Vivid Gallery where Brad Pitt did his shopping buying Atelier Van Lieshout pieces : the Mini Capsule Hotel (above, presented outside Hall 5) for his Santa Barbara home, a lounge chair and the female version of the Family lamp. Total : about 150 000 euros...

What is left for us then? Well, they were affordable pieces. If you don't want to buy a Royère at Jacques Lacoste (sold, in any case), you check-book will not resist Eric Benqué (Emmanuel Perrotin) or the ceramics presented by Galerie Pierre Marie Giraud. Nevertheless, Design Miami is for the large public and aims to delight and surprise. The Real Time installation by Maarten Baas was certainly a highlight with some visitors hesitating to knock on the little workshop's door where a man could be found (above).

Mathieu Lehanneur fait partir la lumière en fumée (Smoke, Carpenters Workshop Gallery) / Il ne reste pas une miette des vases en papier compressé du Studio Libertiny (Perimeter)

Une chaise Sgabello revisité en 1904 par Carlo Bugatti (Sebastian + Barquet) / L'installation interactive Audience de rAndom International. Avec leur détecteur de mouvement, ces petits miroirs vous suivent du regard.

9.6.09

MEUH

La Suisse excelle dans le graphisme, ici à son apogée dans les années 70. Jean Widmer : Affiche A table (est. 800/1200€)

Swiss time! Tandis que je cours cette semaine à Art Basel... principalement pour Design Miami (!), Artcurial nous attise de gourmandises design helvétique pour la semaine prochaine. Comment résister? Des affiches avant-garde d'Armin Hofmann aux créations des talentueux élèves de l'ECAL en passant par les montres Swatch, cette vente regroupe tant des pièces anciennes que des prototypes et éditions limités de jeunes designers. Une petite sélection assez représentative du design suisse.

Table à piétement métallique par Max Bill

Dépouillement, mobilier réduit à l'essentiel... la synthèse du swiss style des années trente, par Wilhelm Kienzle

Au chaud entre l'Allemagne, la France et l'Italie, le design suisse conjugue les influences pour composer son propre vocabulaire. Un style que l'on pourrait aisément résumer à Werner Moser, Le Corbusier puis Max Bill. Toutes époques confondues, des intérieurs minimaux de l'architecte Hannes Meyer aux luminaires transalpins 70's avec Robert Haussmann, le designers ont adoptés des formes simples, bannissant l'ornementation. Un soucis de qualité, une envie de produits fonctionnels bien conçus, dans la lignée de l'idéologie Werkbund... des objets aujourd'hui perpétués par la jeune garde, l'humour en plus. Le plus bel exemple est certainement le travail de Big-Game, fructueux collectif franco-suisse-belge. Contemporain toujours, certains modèles de rangements USM n'ont pas bougé d'un iota, et ils ont toujours al côte. Une bonne raison pour enchérir sur des modèles vintages imaginés par Fritz Haller et Paul Schärer. N'attendez pas mon retour pour vous faire plaisir... d'autant que les estimations sont basses.

De droite à gauche. De l'avant-garde Willy Guhl (Jardinières, 1951 - est. 1500/2000€) au jeune Michel Carlot (Prototype de la Mold Lamp, 2007 - est. 600/800€), le béton règne toujours dans le design suisse.

Noir et blanc de rigueur, influences Bauhaus oblige. De gauche à droite : Affiche Die Gute Form d'Armin Hofmann, 1954 (est. 1000/1200€); Fauteuil de Willy Guhl, vers 1959.

Swiss time! I'm running off this to Art Basel... mainly to see Design Miami (!) whilst Artcurial is tempting us with gourmet Swiss design treats for next week' auction. The sale is gathering many old pieces and new limited editions by young designers no to mention avant-garde posters by Amin Hofmann and creative works done by the former students of ECAL, as well as some Swatch watches. A small yet precise selection of what is Swiss design.

Situated nice and cosy between Germany, France and Italy, Swiss design combines these influences in design to therefore create an individual style. A certain style that can be easily summarized from Werner Moser to Le Corbusier and Max Bill. The artitect Hannes Meyer created very simple interiors, as were the lights from 70's by Robert Haussmann. During different periods in time, the designers kept to simple lines, eliminating decorative work. Concerned with quality and requiring well made functional objects was close to the Werkbund theory... it continues today with the young generation. The best example of this is probably the french-swiss-belgian trio Big-Game. Remaining popular and modern, USM products are still made the same way today : a reason to bid on the old editions created by Fritz Haller and Paul Schärer. Please don't wait for my return in order to please yourself...

3.6.09

EN PAPIER

Sous la bâche, le tabouret 404H (Thonet)

Stefan Diez n'a pas de style au sens premier du terme, et c'est justement ça qui fait tout le charme de ses créations. Beau paradoxe. Dans la lignée de Konstantin Grcic - dont il fut l'assistant de 1999 à 2002, Diez construit un discours net et rigoureux sur la forme, maîtrisant les contraste, jouant sur la géométrie avec tact. Avec, surtout, un savoir faire exceptionnel. Thonet ne s'y était pas trompé en lui confiant la commande d'une chaise l'année dernière...

A tout juste 38 ans, la galerie de l'école supérieure des arts décoratifs (ESAD) de Strasbourg tend les bras au designer munichois. Et contre toute attente, ce n'est pas ses produits réalisés pour Rosenthal, Moroso ou encore Moleskine qui sont présentés mais ses maquettes, uniquement. Chaises en papier grandeur nature, tables aux angles vifs... ils précèdent le prototype. Cette étape au départ intermédiaire est ici présenté comme un moment à part entière. L'exposition permet ainsi aisément de comprendre l'approche tridimensionnelle de l'espace selon le designer. Ses assises courbes et subtiles, ses tables aux angles marqués casse la fragilité du support. Une métaphore, une vraie signature.

Chaise 404 (Thonet), images : Dominik Hammer - Stefan Diez

Sweet paradox : Stefan Diez has no style, but thats exactly the element that please with his creations. Following Konstantin Grcic - Diez was his assistant from 1999 to 2002, the ducth designer makes a rigorous and straight statement on shape and masters the art of contrast as he carefully plays with shapes. He especially has an exceptional savoir-faire. Thonet made no mistake last year...

This week, the ESAD - Strasbourg's design school host an exhibition with works only by Diez. Against all odds, it is not the products he made for Rosenthal, Moroso or Moleskine that are display there but only his plans. Life size paper chairs, sharp cut tables... only the paper models before the prototypes. This primarily intermediate work stage is presented here as a unique experience. The exhibition provides comprehension of the three-dimensional use of space particular to Diez. His slight curves in seating and tables's precise angles therefore avoid a certain fragile aspect of the structure. A metaphor, a true signature.