30.10.10

BIENVENUE CHEZ SOI

Dans le salon, mobile d'Olafur Eliasson

On met toujours du temps à digérer la semaine de la FIAC - qui fut cette année très bonne du côté des foires off avec Light#7 au Point Ephémère et Chic rive gauche (j'en reparlerais), chacun peut en témoigner. Au delà des traditionnels foires avec leur murs épais comme du carton, il y a des concepts plus chaleureux : exposer de l'art contemporain dans de nobles demeures. Un concept inspirant d'ailleurs depuis longtemps le monde des galeries, qui aimentà se lover dans d'anciens appartements quand ils en ont l'occasion. Il est bien simple que, lorsque vous êtes invité dans une demeure, les attentions portées à l'ambiance et au confort de l'invité sont deséléments capitaux avant même d'apprécier le contenu de "ce que l'on vous sert". La collection de Chiara et Steve Rosenblum, qui a ouverte ses portes dans le XIIIe arrondissement cette semaine, était à ce titre différent tant le contenu semblait primer sur l'ambiance, froide. Moins porté sur la notion de curiosité, le parcours Rive Gauche/Rive Droite récemment organisé par le galeriste Marc Jancou permettait de s'introduire dans des lieux privés comme l'appartement de Jean-Marcel Camard... bien fourni.



Exposition Jean Prouvé : Architectures à la galerie Gagosian

Rue de Ponthieu, Larry Gagosian apporte sur la place parisienne son irrémédiable professionnalisme en terme d'accueil et bien sûr de contenu - même si l'on aurait pu ici se passer de Cy Twombly qui devient récurrent à chaque ouverture d'un Gagosian. A l'étage, la très belle pièce est réservée aux transactions. Tout est conçu pour mettre à l'aise le visiteur comme les gros portefeuilles. Difficile de vouloir partir de la galerie dès que l'on y et les pieds...

Mieux encore mais d'un tout autre ordre, il fallait pendant cette semaine aller prendre un verre ou deux du côté de La Réserve, le très bel hôtel privé qui ouvre tout les deux ans sa petite porte à l'art contemporain sous la houlette de Laurence Dreyfus, la plus sympathique des conseillères du genre. Dispositifs vidéos dans la salle de bain, masques de Mathieu Mercier dans la chambre, skateboards d'Anselm Reyle et harnais dans l'antichambres... les toiles se contentent sagement des murs du séjour. Sans oublier des installations sur les terrasses. D'Olafur Eliasson à Douglas White, il y avait beaucoup, beaucoup d'oeuvres exposées - envahissant l'espace de façon étonnement limpide. Avec les différents horizons desquels proviennent les artistes, la narration scénographique est tout sauf un monologue, comme si plusieurs commissaires y auraient vécu de temps à autre. L'un apportant une oeuvre achetée à l'étranger, l'autre une découverte parisienne en galerie... Une sélection sous le thème de la Mascarade, nom de cette quatrième édition. Un beau foutoir de luxe simplement mise en scène même si parfois cela aurait gagné à être mieux éclairé.

A la question de savoir si l'on peut vivre 24 heures sur 24 avec une tonne d'oeuvres contemporaines du salon jusque dans la douche, on a envie de répondre oui. Et tout particulièrement si la Réserve nous y autorisait, en rendant la chose pérenne... Le rêve impossible. Dormir avec une toile et prendre son bain avec une video, au grand dam de l'électrocution.... Si à notre époque Claude François mourrait dans son bain en compagnie d'une vidéo de Bill Viola, on ne lui en aurait sûrement pas voulu.

Sur la terrasse donnant sur la place du Trocadero, palmier en pneus crevés de Douglas White

Dans la chambre, vidéo de Charlotte Cornaton


26.10.10

HOLD ON

Le bûcheron (2007), Thomas Mailaender. Est. 2000-2500 eur. Aucune adjudication. Leclere à Marseille, vente du 23 octobre.

Le design vintage se porte bien merci. A Paris, une récente vente Artcurial (vous savez, ces ventes où l'on veut mettre des ordres sur tout à la lecture du catalogue...) a vu la quasi totalité de ses lots vendus proches des estimations et souvent au dessus. Beaucoup de beau monde comme d'hab', de belles choses dans leur premières années d'édition. Mais tandis que l'acheteur parisien lambda semble avoir tourné la page des deux P sauf exceptions d'exception, le provincial lui, n'accroche étrangement pas au wagon des dernières productions de Prouvé / Perriand (et depuis peu Jeanneret) qui circulent encore et toujours. A Marseille, la chic maison de vente Leclere a ainsi affiché des estimations soutenues pour des assises de ce dernier en provenance du classique fief du genre : Chandigarh, en Inde. Du mobilier très peu remporté de même que de très beaux exemples de design contemporain (ci-dessous) ont été ravalés.

Pour cette dernière catégorie, les prises de risques des acheteurs sont depuis depuis quelque temps revues à la baisse, dans une vision altérée selon laquelle on préférerait acheter des pièces "sures" c'est à dire vintage, populaire et signée où une énième digestion de travers du terme anglophone dans la continuité des carnages fait au pauvre "design". Miser sur des pièces de création récente aux enchères est prendre intelligemment des risques. Laissons donc à ceux qui le veulent bien le soin de chérir leurs regrets à ne pas avoir tel buffet ou telle lampe car elle est "vintage" et s'attacher aux dernières éditions ou disponibilités des classiques du genre estimés à prix d'or pour cause de succès. Courtisons plutôt les beaux inconnus, les one of a kind et petits invraisemblables avant qu'il ne soient ravalés...


Appliques Ushiwa III (vendu par paire) d'Ingo Maurer (Design M, 1973) 1020 eur. / Lampadaire Butterfly par Tobia Scarpa (Flos, 1985) 574 eur. Artcurial, vente du 18 Octobre.


Compilation Art & Décoration (d'une suite de 36 volumes) 3188 eur. /Garniture de bureau en cuir et pot en onyx (1950) 281 eur. Artcurial, vente du 18 Octobre.


Bibliothèque Brosse d'Inga Sempé (Edra, 2003) Est. 4000-5000 eur. /Table unique en résine polyuréthane de Louis Durot (2005) Est. 6000-8000 eur. / Paire de lampe à poser en métal et carton par André Courrèges (circa 1985). Est. 1000-1200 eur. Le tout sans adjudications. Leclere à Marseille, vente du 23 octobre.

Lampe de table en agrafe par Ettore Sottsass (Erco, 1973) 446 eur. / Lampe de table Nemea de Vico Magistretti. (Artemide, 1979) 255 eur. Artcurial, vente du 18 Octobre.

18.10.10

OCTOBER B.

Courtrai 2010










17.10.10

SAMPLES OF REALITY

That and this (2009), Dike Blair (Gagosian Gallery, NYC)

On ne sait pas bien encore où l'on va mais on en connaît déjà la teneur. Est-ce une sculpture? Un meuble? Quoi qu'il en soit cela reste un jeu où les règles ne sont pas encore bien définies. Là, une nouvelle mode où le retour insoupçonné de l'étui à bananes (!), vu chez Habitat puis à la biennale de Courtrai. Voilà qui pourrait faire plaisir à Philippe Katerine... Grâce au designer Christian Désile connaissait déjà aussi la chaise pliable dont l'épaisseur, une fois pliée, ne dépassait pas celle d'une planche à découper le pain. Une nouvelle icône éditée par Vange. Dans le même genre mais toutefois plus conceptuel et moins praticable, voici maintenant venu le bureau tenant dans une seule plaque en bois massif. Un meuble imaginé par le studio KapteinBolt, qui avait déjà expérimenté la chose version penderie en utilisant une seul rectangle de carton. Un structure mobilière réduite au minimum qui, invisible quand elle est inutilisée, en rappelle de plus ou moins loin la massivité seventies des cabinets multifonctions Total Furnishing Units (1971-72) de Joe Colombo. Les contemporains Tomek Rygalik et Allan Wexler s'y sont aussi récemment essayés.

Nettement plus hybride mais tout aussi énigmatique quand son sens n'est pas exploité, les modules de Dike Blair distillent des objets fonctionnels ou les traces laissé par ses derniers. Au delà de leur aspect formel tout aussi minimal mais richement hystérique quand à la combinaison de matériaux affichés, on s'amuse à observer une lampe d'Isamu Noguchi par ci, de la peinture à l'huile dégoulinante par là... Des fragments de réels plus ou moins identifiables dans une structure abstraite aux contours pourtant familiers. Le reflet d'une époque où faute d'obtenir la lune, on tente d'en retenir les morceaux. Aussi noir soit-elle.

FLKS (2010), KapteinBolt


Applique Dark Moon, Christian Ghion (Forestier) / Boîte à banane en plastique vert, Habitat

SUPER 9

A G. : Wonderland (2006), Hippolyte Hentgen /Joseph Pelling, gagnant du prix Partouche 2010

L'Automne va déjà très (trop) vite. Le blog dort donc un peu pour cause de course contre la montre... L'occasion pour une escale au Havre. Pourquoi le Havre? Parce qu'Arts Le Havre : biennale d'art contemporain! Au bout de quelques heures bloqué sur le périph parisien, la deuxième cité portuaire de France se mérite. Malgré sa réputation de métropole aux allures staliniennes (>>> Grand Paris anymore?) où le taux de chômage est deux fois plus élevé qu'ailleurs, son charme austère est resté intact, lui conférant une étrange douceur de vivre avec ses espaces maritimes préservés du côté des plages de galets. Sous la houlette du très fier et décontracté Jean-Marc Thévenet (ex du festival de la bande dessinée d'Angoulême), le troisième parcours organisé pour cette biennale ne chôme pas! De Wim Delvoye à Ruppert & Mulot, une floppée d'artistes ont été invités. Un parcours qui mise sur la qualité de son jus en l'élévation (enfin méritée) de la bande dessinée en art majeur incontournable.

Ext. G : Post-Its (2007), Florent Ruppert et Jérôme Mulot / Prière de l'Isha (2008), Achraf Touloub

Banana Blues (2008), Wessel de Jong / Ursonate (2003), Lisa Paclet

Des 147 cabines de plages de Saint-Adresse aux vitrines du magasin Eurodif en passant par l'incontournable Pasino (partenaire de l'évènement), le Havre voit grand. Pas étonnant que la ville offre à l'évènement son emblématique Musée maritime et portuaire pour l'exposition des oeuvres mini/maxi des 22 artistes qui donnent actuellement le ton en la matière. Pour couronner le tout, le jury attribuait samedi dernier son prix du meilleur court-métrage "expérimental". Avec Ursonate, de l'italo-canadienne Lisa Paclet qui rendait àsa façon écho aux chants de dadas zurichois dans les années 20, le jeune hollandais Wessel de Jong était mon favori. "Entièrement réalisé en utilisant Adobe Flash pour voir ce que ça pourrait faire (!)" selon l'intéressé, Banana Blues est un petit bijou de bricolage je-m'en-foutiste coloré et absurde. Moins naïf et beaucoup plus fin, c'est l'anglais JosepItalich Pelling qui remporta la mise avec Outside the box, fablette efficace qui tient son titre de la fameuse expression anglophone. Une expression très (trop) souvent utilisée à toutes les sauces : "Mes professeurs me disaient toujours cette phrase sans que je sache vraiment ce que cela voulait dire. Cela m'irritait beaucoup jusqu'à ce queje me suis rendu compte qu'en demandait à droite à gauchepersonne n'avait vraiment connaissance de sa réelle signification!" Une oeuvre so british à voir ici. Petite fraîcheur comme d'autres dans ce programme jeune et audacieux qui balaye en coup d'oeil les fantômes des docks abandonnés du Havre... Comme d'habitude (et une fois n'est pas coutume), c'est très souvent dans les villes au ciel grisâtre que l'on trouve la meilleur came. Next stop? Belgium!

A l'intérieur de la maison : Otto, court-métrage de Guillaume Pinard au Portique, espace d'art contemporain.

Insert (2001), Frank Scurti

Oeuvres in situ sur les cabines de plage, Virginie Barré / Vue de la ville d'Auguste Perret depuis le front de mer

5.10.10

SEPTEMBER B.


A la boutique This is Mapp du quartier Dansaert, chaise de Christian Désile pour Vange


A chaque fois que je retourne à Bruxelles, je me dis en retour que je ferais un méga post sur la ville et tout ce qui s'y passe, car la créativité y est foisonnante. Et puis en rentrant comme d'habitude à Paris je me retrouve avec des sacs entiers de livres et documentations à ne plus savoir ou donner de la tête. Autant donc en venir à la simplicité, puisqu'il s'agît justement de cela. Les belges, sous leur air trop sympa et j'en passe et des meilleurs, on avant tout un heureux complexe de ne jamais traiter la simplicité en design produit comme tout le monde, l'évoquant plutôt sous forme de jeu. Du slightly twisted simple design en somme. Le petit parcours qui se tient dans la ville pendant le festival Design September est à ce sujet un jeu où repérer les petits drapeaux bleus qui indiquent les espaces d'expositions et galeries va de paire avec le fait de s'inviter dans les studios des designers (Atelier A1, Charles Kaisin, Xavier Lust...) ouverts pour l'occasion. On fini ainsi toujours pas discuter jusqu'à plus soif avec les exposants. Un parcours pointu et décontracté où les designers comme les galeries jouent le jeu. Un jeu auquel le "grand public" répond présent. Nos Designer's Days devraient en prendre de la graine...

Si cependant beaucoup de pièces made in Belgium refont leur apparition dans ce parcours (Big table d'Alain Gilles pour Bonaldo, chaise pliable de Christian Désile pour Vange...), souvent des prototypes pour en illustrer la genèse, les créateurs belges (et étrangers) proposent beaucoup de nouvelles pièces qui revisitent la notion de simplicité en design. Des propositions joliment décalées et poétiques comme chez Alice Pilastre (ENSAV La Cambre), qui propose des textiles sonores (ci-dessous), nouvelles et prometteuses avec Alain Berteau et son système de légers meubles en Corian présentés sous forme de plaques qui s'assemblent comme un château de cartes, et enfin tout simplement dans l'air du temps avec le studio Joon & Jung qui entend resolidariser le tissu social à l'heure du tout technologique où sur un filet de pêche solidifié par de la résine court en guise de dossier invisible sur plusieurs chaises. Dans ce tas de nouveautés toutes plus excitantes les unes que les autres et dont on espère toujours qu'elles passent à l'édition se cachaient des revenants de toujours, remixés comme des tabourets d'Alvar Aalto à la très bonne galerie Diito et des luminaires de Michele de Lucchi conçus à partir d'ampoules de différentes tailes, chez White Design. Sans oubliez pléthores de conférences et une grande exposition : Fighting the Box, à la Centrale Electrique. Je vous invite à ce titre à vous reporter sur le catalogue. Prochaine édition en 2011.

Pliages de Léa Ricorday et Ritournelles d'Alice Pilastre, projets exposés à La Cambre / Suspension en polystyrène de Kwangho Lee à la boutique de mode et design Hunting & Collecting

Chaises de Joon & Jung à la Jonas Gallery

Superbes rééditions du mobilier Jules Wabbes (1919-1974) par Bulo, exposées aux les galeries de la Reine

Les nouveaux traveaux d'Alain Berteau, entièrement en Corian, exposés également aux galeries de la Reine avec ses accessoires en bakélite pour Tamawa.