23.12.09

STICK TO WHAT YOU KNOW



Trop vite, trop court, Noël est là, et le stress des cadeaux avec. Quoi de plus compliqué en sus d'en trouver pour nos chères têtes blondes. Tandis que l'on compte supprimer l'Histoire pour les scientifiques en herbe, Monsieur Design prône sa spécialité dès le plus jeune âge. Et pourquoi par enseigner le Design en primaire pendant qu'on y est? ... Histoire d'installer les bambins aux premières loges de la création contemporaine. Pas besoin de vous faire un dessin pour vous démontrer que les propositions affluent en la matière, les grands éditeurs comme Vitra ou Kartell les premiers dans l'arène. Une immense partie où les adultes ont tout leur mot à dire, sinon leur style à imposer. Le dernier exemple en date, c'est Jean-François et Eloi de Normal Studio qui nous l'ont offert avec la suite de leur collaboration pour Tolix (design, identité visuelle et tout et tout) : une collection pour enfant (dispo chez Merci)! Même Enzo Mari avait il y a près de six ans maintenant crée une mini chaise pour Magis (ci-dessous) On retrouve a coup sur leurs amateurs dans les couloirs de la nouvelle expo aux Arts Décoratifs consacré à l'univers Playmobil, la tête remplie d'étoiles en sortant, prêts pour 2010! Bonnes fêtes les kids... Stay in touch : designmonsieur@gmail.com

Grandeur et gentille décadence pour adulte en background : Vols Virgin Galactic / Décorations lumineuses dans les rues de Milan par Patricia Urquiola. Produits durables et efficaces pour les petits : T-Rex en érable naturel, Little Alouette / Chaise pour enfant par Enzo Mari, Magis

Parce qu'il y a toujours quelque chose de suédois sous le sapin : Chaises pour enfant N65 vintage par Alvar Aalto (toujours éditées par Artek) / Voiture en bois laqué Streamliner Classic, Playsam

29.11.09

BENTO SURPRISE

Un gros container, une scénographie inédite pour la Designer's week de Tokyo, 2004

Disons le clairement, la course à la nouvelle marque aux produits flambants neufs, encore-plus-dingue que le concurrent, offrant toujours plus pour toujours plus cher est en sérieuse voix de disparition depuis plus d'un an. A l'image d'Hentsch Man, petite marque londonienne de fringues pour hommes, élémentaires et bien coupés, en vente exclusivement en ligne qui a ouvert récemment sa "vraie" boutique (après nombres de pop-up stores) dans le quartier de Saint James. Le succès est tel qu'essayer une chemise pendant la pause déj requierait pas mal d'attente en Octobre dernier. La fausse bonne nouvelle rest que le Japon regorge de ce genre de petits labels, qui côté mode comme Visvim ou design comme Graf n'attendrons jamais de faire massivement fureur dans la vieille Europe puisque les quelques distributeurs de la hype que sont Colette, Corso Como et Co semble avoir passé leur chemin sur ceux-ci. Seulement, certains n'attendent pas d'être distribués arracher par tout les industriels. Exemple avec Tonerico.

Derrière ce nom se cache les trois plus prolifiques designers japonais des ces cinq dernières années. L'aventure commence en 2002 quand Hiroshi Yoneya, Ken Kimizuka et Yumi Masuko se rencontrent à la sortie de l'école. Très vite ils montent un studio commun. Si les premières réalisations sont colorées, dans un esprit "sortie de 2000" finalement assez proche de Christophe Pillet pour le fauteuil Sofa 03 ou même de Ron Arad avec Gusha (pièce unique-pied de-nez aux designers japonais de l'époque qui désiraient produire massivement) leur fond d'activité s'orientent rapidement vers l'architecture d'intérieur, épurant massivement par la suite leurs créations. Dans la grande tradition des cafés "designés" à Tokyo, dont la réalisation du café Spiral par Shiro Kuramata dans les années 80 pourrait se situer comme point d'orgue, Tonerico ont pensé un nombre impressionnant de restaurants et autres boutiques tokyoïtes depuis leurs bureaux de Shibuya, alignant des références prestigieuses tel Hermès. En France l'année dernière, ils avaient signé (un grand mot, vu l'épure volontairement anonyme de leur travail) la scénographie de l'expo WA à la Maison de la culture du Japon.

Côté objets et mobilier, leurs céramiques, chaises, tables et étagères font état d'un soucis extrême au niveau de la recherche des proportions et des matériaux, une pleine référence à la culture japonaise. La série Cell est d'ailleurs inspiré des "monaka", ces petits biscuit japonais creux à l'intérieurs. Dans la même veine, réduisant l'espace à la seule fonction d'habiter, supprimant le superflu, les cloisons mobiles sont reines et il n'est pas rare que que les chaises comportent un dossier quasi inexistant, ou juste simplement matérialisés par ses contours et une assise très fine (un peu à la manière des nouvelles chaises de Nendo), utilisant des matériaux naturels comme de la paille (série Ami). Loin de leur ouvrir les portes de l'Europe, leur première exposition en 2003 au Satellite du Salone de Milan qui présentait des porcelaines avait laissé les éditeurs plutôt froids. Au contraire a Tokyo, une poignée de magasins proposent leur meubles, toujours sur liste d'attente. Irritant succès d'estime.

Etagère 48way, présentée à Milan en 2003 / Assiette en porcelaine Cell

Table de la série Aun, au piétement croisé très Ado Chale

A-House à Tokyo, conception Hiroshi Yoneka, 2001

22.11.09

DECONSTRUCTING COFFEE



Il est rare que j'évoque ici le design industriel et technologique, celui des montres, appareils électroménagers et concepts cars... Pourtant il y aurait à en dire. Andrea de Mathieu Lehanneur (qui vient d'ailleurs d'entrer dans la collection permanente du Musée des Arts Décoratifs) est enfin commercialisé, Jasper Morrison sort ses temps-ci une superbe horloge sous l'égide de Muji tandis que le grille pain transparent de Magimix s'annonce être l'un des cadeaux phare pour Noël. Quid du café? Si Nespresso est loin d'être "développement durable" avec ses nombreuses capsules en alu qui s'entassent dans la poubelle et si Bodum reste la seule alternative old-school, la révolution nous vient tout droit du Canada, une des nombreuses terres où l'asphyxie Starbucks a donné lieu a l'émergence de coffee shop indépendants.

Le jeune designer Philippe-Albert Lefebvre, tout juste diplomé de l'Université de Montréal et prêt pour l'ECAL, a réalisé pour sa présentation de fin d'année le genre d'ustensile dont ont tombe immédiatement amoureux tant au niveau de la forme que de la technique. En l'espèce donc, l'eau portée à ébullition dans un reservoir vient couler automatiquement par gravité dans sa copine la carafe où un filtre métallique permanent (plus besoin de le changer) contient le café ou le thé. Réalisé avec l'aide de Braun, le design s'inscrit dans la lignée des appareils conçus par Dieter Rams pour la marque dans les années 60. Un processus volontairement déconstruit, rapide, écolo et ludique revenant, à l'encontre de toute tendance, à l'essence même de la cafetière. Reste à croiser les doigts pour sa commercialisation...

Maquettes de la cafetière KF700-S (Université de Montréal)

Philippe-Albert Lefebvre (photo : Eric Demay)

It's rare that I write about industrial design concerning watches, electrical appliances and cars... Nevertheless there are comments to be made. Mathieu Lehanneur's Andrea (which is now part of the Musée des Arts Décoratifs permanent collection) is at last being commercialised, Jasper Morrison has recently produced a superb wall clock under Muji's name and the transparent Magimix toaster is a popular choice on this year Xmas gift list. How about coffee? Even if Nespresso is not helping out 100% ecologically with their coffee doses made out of aluminum and filling the trash can, the Bodum method is still a smart alternative. However the new "trend" has come from Montréal, as another saturated Starbucks market gave way to new independent coffee shops.

The young canadian designer Philippe-Albert Lefebvre who has just obtained a diploma at the University of Montréal is now ready for ECAL. He made an outstanding presentation at his final exam with an object of instant attraction because of its shape and technique. It represented a reservoir of boiling water that automatically drips down due to gravity into a coffee pot equipped with a permanent metallic filter (no replacement necessary) which contained the coffee of the tea leaves. The appliance made with the assistance of Braun has a Dieter Rams feeling, remembering his creations in the sixties. Choosing to use a process that pulls it to pieces, it is quick, clever and environmentally protective therefore trendy and defining today's coffee culture. Hoping then to see it on the market...

17.11.09

RISKS


Mur lumineux Stanton Micken de Philippe Starck (1979, Electrorama, est. 1100-1200 eur)


Novembre où la saison des ventes aux enchères, et design s'il vous plaît. Mieux vaut donc tout de suite oublier le Salon du Vintage qui s'est tenu boulevard Saint Germain ce weekend sans aucune surprise à la clef pour se concentrer sur les pièces en vente sur lesquelles il faut miser. Au programme, un petit passage obligé par la seconde dispersion de la collection Yves Saint Laurent, (très cottage et pas franchement design même s'il l'on y trouve du Eames et du Saarinen) exceptionnelle de part la qualité de chaque lot, avec comme un des nombreux point d'orgue un impressionnant bronze de César (L'homme de Draguignan) estimé à près de 60 000 euros. Toujours dans le caritatif, Artcurial organise une mini-vente (une soixantaine de lots) chez Forum Diffusion au profit de la Fédération Internationale des Droits de l'Homme (FIDH) et du V-DAY, contre la violence faite aux femmes, avec des pièces intéressantes dont une table du label au renard Kistuné (voir ci-dessous) produite en édition limitée pour l'ouverture de son guérilla store à Londres en Octobre dernier, plus une subtile coupe en cuivre de Cédric Ragot. La maison remettra le couvert à la fin du mois avec Touchons du bois, vente thématique qui cerne des belles valeurs du design européen où un candélabre inédit en acier brossé de Poul Kjaerholm et des folies de Garouste et Bonetti seront à saisir. Fort à parier également que l'ex-outsider Pierre Jeanneret, longtemps dans l'ombre de Prouvé et Perriand, stabilisera enfin sa côte avec son impressionnante table éclairante dont l'estimation frôle les 100 000 euros.

Coupe P4 de Cédric Ragot (2005, Edition Forum Diffusion est. 300-500 eur /
Les tables Fabian (2007, est. 1500-2000 eur) mises en scène dans le pop up store Kistuné à Chelsea, Londres

Mais le marathon commence dès aujourd'hui avec Tajan et une vente XXe plutôt monotone bourrée de nombreux fauteuils de grands maîtres italiens (Ponti, Mollino...) où l'on retiendra plutôt une rare lampe d'Ettore Sottsass au fût métallisé et fumé aux proportions très années 30 bien que 80. La plus belle part du gâteau attendra pour la semaine prochaine avec la vente Cornette à Drouot Montaigne : beaucoup de scandinaves et de reminiscences memphisiennes, très abordables, côtoieront l'esthétique post-moderne des premières réalisations avant-gardes et luxueuses de Philippe Starck à la fin des années quatre-vingt à savoir un petit secrétaire mignon tout plein en sycomore et un très rare et imposant mur lumineux tout fait de verre dépoli et d'acier qui influera un peu d'audace à n'importe quel intérieur.

Voilà pour la météo. A vos ordres d'achats!

Miroir circulaire en bronze doré et passementerie de fils d'or, Emile-Jacques Ruhlmann (circa 1920, est. 15-20 000 eur) /
Table Compas de Jean Prouvé en formica et métal laqué vert (circa 1950, est. 3000/5000 eur)

Table de bibliothèque éclairante en teck vernissé et tôle pliée, par Pierre Jeanneret (circa 1950, est. 50-70 000 eur) ici dans la librairie d'art Gagosian à Manhattan.

9.11.09

L'AGE DU LIEGE

Courtesy Galerie Kreo / Fabrice Gousset

Après Jasper Morrison et sa fameuse série Cork pour Vitra et Mooi où fauteuils, tables et tabourets étaient entièrement conçus en liège, Martin Szekely a dévoilé samedi dernier rue Dauphine Simple Boxes. L'autre pape du design minimal contemporain s'est mis à l'utilisation de ce matériau en partant du simple postulat selon lequel chacun d'eux se devraient d'être vus de près ou de loin comme de "simples boites". Toujours plus loin dans l'abstraction et toujours très à l'avance dans la technique, avec toute l'exigence matérielle rendue possible par le labo du design qu'est Kreo depuis dix ans, Szekely manie le liège avec génie, mue des tabourets en boite et des tables en tabourets à l'infini...

Ici, Martin dompte le liège (matériau-scorpion par excellence utilisée depuis le XVIIe, résistant au feu et à l'humidité) avec une force technique sans pareille en réduisant l'assemblage à de simples emboîtements. Associé à la puissance esthétique des formes, il signe ainsi un de ses plus beaux ensembles pour la galerie parisienne depuis les tables en béton Concrete (2008). Gardez-vous en bien de dire que le liège est recyclable...


3.11.09

COMPOST CHIC



Impossible de vous laissez la semaine dernière à propos de la FIAC sans vous parler du stand de la galerie berlinoise Klosterfelde qui offrait au regard des visiteurs un total look Dan Peterman circa 1998, du sol au plafond (ci-dessus). Idée brillante qui fit presque oublier les dessins d'autres artistes au mur. L'artiste américain, connu pour son fauteuil-caddy (qui a inspiré plus d'un designer depuis les années 80) et ses installations brutes et minimales à la frontière du land art, du ready made et du design quand il recycle du plastique usagé puis composté pour en faire un sol, des murs, des étagères et même une maison pour clodos; poursuit ses expérimentations politico-écolos for the sake of art.

Pointant du doigt une "société du déchet" physiologiquement détruite par l'enfer de la surconsommation, Peterman utilise nos déchets - plastique dégueu comme bois humide, pour créer des propositions architecturales et mobilières intenses conjugables à l'infini, déployant par la même occasion avec malice et ironie une critique dont l'intelligence se mesure à sa volonté constructiviste. De la matière à penser pour tout récessionnisto(-ta) qui se respecte...


Ton Vertical Storage, 700 étagères en plastique recyclé (1996) / Dan Peterman's home & studio

It's unthinkable not to get back to you since last week's FIAC article without talking about the Berlin Klosterfelde gallery stand which displayed a complete Dan Peterman them from floor to walls (see below). A brillant idea that almost out-shined the other artist's work on show. The american artist well known for his supermarket trolley-chair (which has inspired many designers since the eighties) and his raw & minimalist work between land art, ready made and design when he recycles used and composted plastic to make floors, walls, shelves and even a house for the homeless; continues his green-political tainted experimentations for the sake of art.

Through his works, Peterman criticizes today's "throw-away society" which is physiologically destroyed by over-consumerism. He uses the trash of our wastes such as filthy plastic and decaying wood to create architectural constructions and strongs elements of furniture which are constructed in multiple ways and convey, with clever irony, a statement of his intelligence proportional to his productivity. Thought provoking for each of us aware in the world today...

Ground Cover (1995) / Thank You for Your Patronage : Chairs from Street Carts (1989, Museum of Contemporary Art, Chicago)

Vue de l'installation en 1998

26.10.09

AMPHIBOLOGIE


Tabouret avec assise en bois de bouleau (2007) d'Andrea Branzi (Galerie Kreo)

L'art contemporain c'est bien. Le design encore mieux. Mais quand il s'agit de la FIAC, tous les regards se tournent naturellement vers le premier. Et tant mieux puisque cette année fut un très bon cru. Sauf que dans l'oeil d'un design addict, tout est prétexte d'en revenir au design, certaines oeuvres contemporains pouvant aisément prétendre au statut de meuble et/ou objet. En l'espèce, la forme avant tout pourrait définir cette attribution tant les frontières entre art et design semblent toujours de plus en plus minces. Et même si les galeries de design ont cette année été soigneusement placées au fond de la nef du Grand Palais (Dieu merci, cela change des interminables escaliers à monter pour accéder au Saint Graal), certains artistes (étrangers en majorité, exposés souvent par des galeries italiennes ou germaniques) font habillement référence à l'univers codé design avec une perspective tout non-fonctionnelle qui fait leur charme. Des oeuvres tantôt surprenantes, rentre-dedans ou volontairement énigmatiques. Tout est dans le cartel...

Stand Pilar Corrias, mezzanine du Grand Palais

Johannes Wohnseifer, Shutter-Shutter Painting #1 (2009) / Stand de la Galerie bruxelloise Dependance

Special place (2009), Anya Zholud

Untitled (2008) de Marcio Garcia Torres, des assiettes en céramiques de différents diamètres (Galerie Jan Mot, Bruxelles) / Infidelity (2009) de Wilfredo Prieto : un simple crayon rouge et le capuchon d'un stylo bleu posé sur une étagère (Galerie Nogueras Blanchard, Barcelone)

NB : Et puis comme la photo était partout à la FIAC comme à Slick et sous le pont Alexandre III à Show Off, je ne pouvais pas vous laisser sans poster quelques prises de Ian Wallace, artiste canadien qui manie avec subtilité et réalisme la photographie. Souvent prises sur le vif, où ci-dessous avec les photographies du célèbre pavillon de Mies Van der Rohe à Barcelone, soigneusement léchées, elles souvent sont accolées à de simples pans de couleurs. Une signature à suivre chez Yvon Lambert...

Vues du Pavillon Mies Van Der Rohe à Barcelone (2009), par Ian Wallace

A droite, fondu dans le décor, le miroir hybride (2006) de Jeppe Hein (Galerie Johann Köning, Berlin)

Fiorito (Cerchi) (2008), Andrea Sala (Galerie Monica de Cardenas, Milan) / Ohne Titel (Wolfsburg), dernière oeuvre en date de Florian Slotawa (Galerie Sies + Höke, Düsseldorf) qui fait actuellement l'objet d'une rétrospective au PS1 de New York.

17.10.09

(EXTREME) MAKEOVER



DesignArt n'est plus. Vive le Pavilion of Art and Design? Pas si simple que ça. Ambiance morose, petite poignée d'acheteurs et sourires au coin des lèvres étaient au programme mercredi dernier, premier jour d'ouverture au public de cet homologue londonien de notre cher PAD. Mais alors que l'Art moderne était exposé à Paris comme une savante option au design XXe et contemporain, la véritable star du salon, les rôles ce sont inversés cette année. Fini 2007 et le lyrisme inouï des prix affichés et atteints par le design. Fini 2008 où l'on se battait pour une pièce de Marc Quinn tandis que les visiteurs affluaient dans les allées, en marge du bouillonnement de Frieze. La crise serait-elle passée par la case design-art?

L'heure semble désormais à la modestie. Pas sûr donc que cette année une oeuvre comme la lampe Illuminatus d'Atelier Van Lieshout (ci-dessous) trouve preneur... Pourtant, à moins de 10 000 eur, les prix restent corrects. Un peu plus loin dans allées, Perimeter mise (à temps) sur une importante table Cathédrale du regretté Pierre Paulin tandis que la Galerie du Passage (Pierre Passebon) expose un total look Pol Quadens : lit, chevet, table basse, étagères... Le tout entièrement réalisé en Corian. Avec en plus Olivier Watelet et le designer américain Josef Walsh présent chez Todd Merrill (Contemporary Studio) -seul véritable nouveau venu, c'est presque si l'on cherchait cette année où était le design. Envolées Mouvements Modernes, Hervé Van der Straeten, HP le Studio, Sebastian+Barquet (dont seul la galerie de New York a subsistée)... même David Gill (Londres) n'a même pas osé franchir le Thames. Un signe sérieux d'affaiblissement des galeries de cette catégorie, sans doutes effrayées cette année à l'idée de shipper leur marchandises sans possible retour sur investissement.

Fauteuil en bois laqué, par Josef Walsh

Le très beau stand, tout en retenue, de Franck Laigneau, proposait des sublimes assiettes de Tiffany ainsi que des meubles signés Carl Wetsman

Collier, Louise Bourgeois / Buffet-crédence, Paul Evans

Pour compenser ce manque tout en maintenant la réputation high quality du salon, Patrick Perrin et Stéphane Custot ont eu l'ingénieuse idée d'ouvrir à fond le PAD aux galeries d'Art moderne, peinture et sculpture. Ainsi, des marchands comme Jacques de la Béraudière (Genève) ou Louisa Guinness font leur entrée - avec en majorité des galeries londoniennes.

Même si cet important changement fait tourner la mayonnaise vers une foire moins pétillante, presque endormie par tant de Dubuffet, Léger, Schiele, Fontana et Soulages... on applaudit poliment cette prise de risque "en arrière", qui n'entache d'ailleurs en rien la réputation éclectique et exigeante so french du Pavilion où le plaisir d'acheter semble ici remplacer l'investissement à tout prix. Un monde à part de Frieze...Peut-on encore seulement parler en l'espèce de "design fair"? Non.

Lampadaire Illuminiatus, Atelier Van Lieshout / Study of the Human Body, Francis Bacon

Berkeley Square, en plein Mayfair - quartier incontournable du luxe londonien qui se bonifie sans cesse (notamment du côté d'Albermale et Dover Street)

12.10.09

ANOTHER SHELF

Lap shelving de Marina Bautier, où l'essence même du meuble de rangement

Symbole du "design" dans sa dimension où la forme se doit de s'effacer devant son contenant, la bibliothèque est le meuble fonctionnel par excellence. Mine de rien, un lot impressionnant de propositions toutes plus farfelues les unes que les autres déboule chaque année. Tandis qu'on oublie la plupart, on prête aisément aux autres des faux airs de successeurs des icônes que sont la Bookworm de Ron Arad et les Cloud Shelves des frères Bouroullec. Voyant cette tendance au renversement volontaire des codes la bibliothèque comme un meuble sobre et ennuyeux, je me suis toujours dit qu'au moment de l'acquisition de ce type de meuble, je n'aurai plus qu'à choisir entre les Billy d'Ikea, la gamme USM ou les rangements modulaires de Dieter Rams pour Vistoe (1960). Simples durables et modulables. Mais qu'il a-t-il seulement de nouveau cette saison pour bousculer ces classiques et ne pas tomber d'inutiles excès baroques? Un nouveau classique pardi!

Selon mes dires, le rangement ultime 2009 serait signé Marina Bautier, énième figure à suivre de l'Atelier A1 (véritable poule aux oeufs d'or belge qui comprend entre autres Big Game, Sylvain Willenz et Nathalie Dewez...). Depuis quelques années, cette trentenaire a su charmer français (Ligne Roset), espagnols (De La Espada, avec son astucieuse chaise-tabouret) et japonais (Idée). Cette année, elle remet le couvert pour nos confrères d'outre Manche. En l'occurrence pour la troisième collection de Case Furniture (Matthew Hilton, Robin Day...) avec un système de rangement d'une rare évidence où étagères et bacs viennent se poser sur une simple structure montants + traverses. Du métal découpé et du chêne, rien de plus. Rassurant et innovant. Pile à temps.


Détail du chêne brut composant la structure de Lap Shelving

Le fauteuil Fold crée l'année dernière reprend le même principe que les étagères Lap Shelving, à savoir d'emboîter deux simples matériaux pour un effet boeuf. Ici du cuir souple rembourré avec une structure en chêne massif.

4.10.09

LET'S GET VISUAL


Dubious Forms, Sydney Pink

Il n'y a pas que Design Art ce mois-ci (oups pardon, Le Pavillon des Arts et du Design...). Après Londres la semaine prochaine, on ira aussi courir en Allemagne pour Illustrative, la mecque de l'art graphique. Après deux stop over à Paris et Zürich les années précédentes, le festival retourne à Berlin. La crème des jeunes graphistes, visual artists et tout le tralala s'y donnent rendez-vous. On y retrouvera des masters comme Keiichi Tanaami et surtout des nouvelles pousses, que les pros et amateurs viennent dénicher en masse. Dans le tas, Sidney Pink et Nigel Evan Dennis sont des plus prometteurs.

Tandis que l'américain-japonais de coeur Sydney Pink, remarqué très tôt par Takashi Murakami, tend une subtile passerelle en mode pastel entre banalité et fantastique, Nigel Evan Dennis rend sympathique n'importe quelle forme géométrique et fait valser Pythagore pour Skinny Fingers, le clip du groupe A Lull (à visionner ci-dessous)...

Et si on échangeait ses billets de train pour Berlin?

Blockswood + Boxeswood, Nigel Evan Dennis

Char 1, Nigel Evan Dennis

There is not only Design Art on this month (oh excuse me, "Pavilion of Arts & Design" as it is called now). After running to London next week, Germany hosts Illustrative, the most influent graphic art event in Europe. After two stop overs being in Paris and Zürich these past years, the festival is finally back in Berlin. The cream of the crop amongst the young graphic designers, visual artists and all the european hip crowd have it in red on their agendas. The numerous professionals and amateurs will be there to find the masters attending the event such as Keiichi Tanaami and of course the new-comers; the most promising are Sidney Pink and Nigel Evan Dennis.

The American yet Japanese influenced Sydney Pink, who was spotted early by Takashi Murakami, creates a connecting rainbow in soft pastel color between the ordinary and science fiction and "kawaï bizzare"; whilst Nigel Evan Dennis brings harmony to any geometric figure and swings triangles for the needs A Lull's Skinny Fingers video clip (see below)...

What if we change our train tickets for Berlin?

A Unlikely Vessel + There's A Reason, Sydney Pink

1.10.09

HOME(S)


Du peu de mobilier de Rei Kawakubo, on connaît surtout ses austères chaises en métal.
Vendu 8000 $ l'année dernière, ce fauteuil est le dernier des 28 dessinés par la japonaise.

De Rei Kawakubo dans les années 80 pour Comme des Garçons à l'empire Armani dont la division Casa est devenue peu à peu une marque à part jusqu'à Diesel plus récemment et of course Rick Owens de façon plus indé, avoir une ligne de mobilier pour une maison de mode est désormais (presque) une évidence. Inutile de préciser que ce phénomène ne touche pour l'instant que les maisons étrangères. En France, le décloisonnement des disciplines ne semble toujours pas être d'actualité. C'est tout juste si l'on se risque à faire du linge de maison et de la vaisselle comme Dior et Rykiel, ces produits officiant - à la manière des parfums, comme le fast access au luxe. Le fait est que l'on a pas forcément envie de posséder chez soi une chaise médaillon Dior gris perlé ou fauteuil en tweed pour faire comme Rue Cambon. Cependant, certaines maisons le font très bien par délà nos frontières. Un des plus beaux exemples récents fut Bottega Veneta qui conjointement à Poltrona Frau sorti une ligne de meubles des plus luxueuses : des malles en cuir surpiquées et des fauteuils à tomber... Une collection restreinte mais fabuleuse. Tout le contraire d'Armani qui repompe sans cesse un style Néo-Nobu vu cent fois ou Scapa (le Ralf-Lauren belge) qui fabrique des meubles dans la veine Flamant à la sauce Polo Sport. Halte à l'overdose!

Bestiale et minimale, la chaise par l'américain Rick Owens. Chez Jousse Entreprise.

Détails de la suite Elle Déco par Martin Margiela au Palais Chaillot

Comme en design, les pieds de nez dans la mode sont légion alors qui de mieux que Martin Margiela de surprendre tout le monde. Alors que tout Milan s'attendait que la Maison présente des meubles, voilà qu'elle lance des énormes stickers trompe l'oeil à la manière de ceux qui habille les murs de ses boutiques. On attend avec impatience la moquette imprimée parquet... Une autre bonne surprise nous provient de la marque américaine James Perse. Connue au pays de l'oncle sam et chez C'line pour ses vêtements très simples aux matières nobles et finitions impeccables, encore peu distribuée en France, la marque signe une collection inspirée des villes de la West Coast, de Malibu à Los Angeles. Une relecture a minima, exempt de tout effet de style, de meubles américains classiques comme les traditionnels fauteuils de metteur en scène et les chaises longues sans piétement. Contrairement à Monsieur Owens qui signe ses singuliers fauteuils "retour de chasse" pour Jousse Entreprise, la démarche reste commerciale bien entendu. Mais pourquoi pas? Cohérence avec l'ADN de la marque, intemporalité du design et qualité du matériaux font le succès. A quand "Home by Marc Jacobs"?

James Perse himself et sa ligne pour la maison / Boutique sur Bleecker St, New York

24.9.09

VS


Jonathan Adler a une passion pour les figurines en céramique. Ci-dessus celles réalisées pour les élections présidentielles...

Revenu de la Grosse Pomme, je me suis posé la question suivante : Qu'est-ce que le new-yorkais qui n'a pas encore les moyens de collectionner dans les galeries de TriBeCa mais qui souhaite viser plus haut que les grandes enseignes peut-il s'offrir pour son intérieur? Les propositions varient mais deux m'ont tapées dans l'oeil. Leur showrooms sont situés dans des quartiers à la mode (Soho pour le premier, le Meatpacking district pour le second), ont un style fondamentalement "américain", mais cependant tout les opposent.


Peut être les des intérieurs les plus sobres par Adler... Sinon vous pouvez opter pour des caniches géants dans votre salon.

A ma droite, Jonathan Adler. Une sorte de Valérie Damidot en masculin qui participe à une émission télé déco sur la chaîne Bravo et dessine une collection capsule pour Barbie, mais qui contrairement à sa confrère française sait aussi bien se faire apprécier des pros que du fan de DIY. Ses boutiques vendent de tout : de l'ensemble de salle à manger à des superbes suspensions néo-fifties en passant par des accessoires estampillés "design" pour chiens et chats. Vu d'ici, l'ensemble pourrait donner le tourni mais ce style glamour over-the-top très coloré et un poil nouveau riche a fait ses preuves commercialement outre Atlantique. Les mauvaises langues le traiteront de David Hicks des pauvres, le kitsch en plus. Pour l'été, c'est un univers summer in the Hamptons sous influence Lisa Perry qu'il déploie. Pour l'hiver, il crée de fausses fourrures, des plaids bariolés et de luxueux cabinets. Un univers unique où le style Côte Ouest se mélange avec du "façon Gio Ponti"; où des fauteuils de style Louis XVI en bois laqué fluo tapissés d'imprimés psychédéliques dont il a le secret côtoient des chinoiseries en plastiques et des faux bustes romains en guise de pied de lampe. De quoi foutre gentillement le feu aux intérieurs de Park Avenue.


Devant la boutique Adler à Soho / Lustre géant chez Hudson

A ma gauche, Hudson Furniture Inc.. La décadence new-look, très peu pour Timber Wolf, le fondateur du studio situé dans un ancien quartier crado devenu chicissime. Plus show-off que que BDDW (qui a d'ailleurs, succès oblique, migré il y a peu de Brooklyn à côté d'Opening Ceremony), Hudson réinterprête l'héritage Nakashima et les grandes heures du design américain dans un style très Downtown, minimal et chic. Leurs meubles : des grandes tables gigantesques en bois massif, des lustres asymétriques et un lit en chêne délicieusement immense. Leurs clients : Lenny Kravitz, Beyoncé et les yuppies de TriBeCa. De quoi attirer du monde dans le showroom, soigneusement caché au fin fond d'un escalier interminable en face du flagship Diane von Furstenberg.

Timber Wolf, le fondateur d'Hudson / A l'opposé des lignes strictes de ses meubles, Hudson a conçu d'étranges fauteuils taillés dans du bois pour Ten thousand things, une chouette boutique de bijoux située en bas du studio.